Noces de Cana_003

Les noces de Cana

Réflexion sur l'évangile du Deuxième dimanche ordinaire

Ils n’ont plus de vin

 

À travers les textes de la fête de Noël, de la visite des Mages, du baptême de Jésus et des Noces de Cana, la liturgie nous offre différentes «manifestations» (épiphanies) de Jésus. Ces fêtes lèvent le voile sur sa véritable identité et nous révèlent graduellement «qui est cet homme».

«Il y eut des noces à Cana de Galilée, et la mère de Jésus y était.  Jésus aussi fut invité, ainsi que ses disciples»

Au temps de Jésus, les noces duraient sept jours. Il faut nous rappeler qu'en Palestine, la vie était extrêmement rude et difficile. Les gens travaillaient beaucoup et vivaient pauvrement. Ils souffraient de nombreuses maladies et avaient recours à une médecine primitive et peu efficace. L'hygiène était minimale et la famine menaçait constamment. La vie était accompagnée d’une grande insécurité. De nombreuses guerres rendaient la vie dangereuse, incertaine et précaire. Dans ce genre de société, les fêtes étaient peu nombreuses, mais on les célébrait avec beaucoup d’enthousiasme et de joie. Elle apportait de la fraternité et de la chaleur humaine dans un monde rempli de souffrances. Chez ces pauvres, pour qu'une fête réussisse, il fallait une forme d'extravagance, de surabondance et de folle libéralité. L’excès était à ordre du jour : «Six cuves de pierre, chacune d’environ cent litres».

Le projet de Jésus se définit avant tout par la fête, symbole de transformation et de plénitude, face à la grisaille et à la dureté de la vie quotidienne.

Dans la routine souvent triste et ennuyante, les gens retrouvaient le sens positif du travail, de l'amour, de la naissance, de la communauté et de la vie,.

Lorsque Jean écrit cette page d’évangile, ça fait quelque 70 ans que les chrétiens se rassemblent, «le jour du Seigneur», autour de la table eucharistique. Il n’a donc pas l’intention nous raconter un fait divers. C’est un texte plein de spiritualité et de théologie. Vous remarquerez que, dans cette histoire de noces, l’épouse n’est même pas mentionnée et l’époux n’apparaît que très brièvement à la fin de l’épisode. Ce qui intéresse Jean, c’est Jésus qui apporte le vin nouveau. C’est une image que l’on retrouve partout dans l’Ancien Testament : «Le Seigneur va donner un banquet pour tous les peuples, un festin de viandes grasses et de vins capiteux.» (Isaïe 25, 6 ; Amos 9, 14 ; Osée 2, 4, etc.)

Il semble que pour chaque couple humain, il peut arriver ce qui s’est passé à Cana. La vie en commun commence avec enthousiasme et dans l’amour réciproque. Avec le temps, cet enthousiasme s’évapore et souvent le couple est menacé d’ennui, de désaccords et parfois d’échec complet. Le «vin qui manque» est le symbole de toutes ces carences profondes. Il existe plein de situations humaines où nous ne pouvons plus rien. Tout manque, il ne semble pas y avoir de solution viable.

Les textes d’aujourd’hui proposent une solution aux difficultés que nous rencontrons à mesure que les années s’écoulent : Inviter Jésus à la noce afin qu’il fasse parti de la maison, qu’il change l’eau insipide de la routine en un amour renouvelé, basé sur la compréhension, le pardon et la solidarité.

Dans ce récit des noces de Cana, Marie devient pour nous un modèle de foi. Elle est la vraie chrétienne qui fait confiance à Jésus : «Tout ce qu’il vous dira, faites-le». La formule est d'apparence banale. Or, c'est une citation de l’Ancien Testament : «Tout le pays d'Égypte souffrit de la faim, et le peuple demanda à grands cris du pain à Pharaon, mais Pharaon dit à tous les Égyptiens: «Allez à Joseph, et tout ce qu'il vous dira, faites-le» (Gen 41,55). Joseph va régler vos problèmes de famine. Ceci se passait une quinzaine de siècles avant Jésus-Christ !

L’eucharistie que nous célébrons chaque dimanche nous rappelle les noces de Cana : la présence du Christ, ses paroles, le miracle du vin. L’eau insipide de notre vie peut être changée en vin de joie, de paix et de fête.

Si nous restons seuls, notre vie devient souvent un fardeau, mais si le Christ nous accompagne, il change notre eau en vin, et nous reprenons goût à la vie.

Notre Dieu n’est pas le Dieu de la montagne, il n’est pas le grand horloger  de Voltaire, lointain et désintéressé, mais l’Emmanuel, le Dieu-avec-nous, le Dieu de la fête, de la noce, le Dieu de l’amour, de la tendresse, de la joie et de la paix, le Dieu qui nous offre son vin nouveau.

Il a été vin nouveau pour les bergers de Bethléem ; pour les chercheurs de Dieu venus du soleil levant ; pour Marie-Madeleine, la prostituée ; Zachée, le collecteur d’impôts ; la Samaritaine aux cinq maris ; Pierre le renégat; la femme adultère condamné à être lapidée ; Nicodème, le vieil homme un peu désabusé ; le voleur condamné à la crucifixion… et des milliers d’autres à travers les âges…

Une alliance nouvelle et des temps nouveaux! Voilà ce que Jésus inaugure en cette fête de noces.

Jésus peut être vin nouveau pour vous et moi, si seulement nous l’invitons à la noce !

Sources: https://www.cursillos.ca/formation/reflexions-dominicales/annee-C/R-C10-Dim2.htm

Réflexion sur l'évangile du Deuxième dimanche ordinaire, C

Par le Père Yvon-Michel Allard, s.v.d., directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada.