Vends ce que tu as et suis moi_001

« Vends ce que tu as et suis-moi » (Mc 10, 17-30)

Jésus fixa sur lui son regard et l’aima

 

Dans ce long extrait d’évangile, Marc poursuit l’enseignement de Jésus sur les exigences requises pour devenir son disciple. Cet enseignement a lieu sur la route en direction de Jérusalem où Jésus va subir son procès et être mis à mort.

Il y a trois éléments distincts dans cet évangile : l’appel du jeune homme riche, la difficulté d’entrer dans le royaume des cieux et la récompense accordée à ceux et celles qui suivent le Christ. Ces éléments ont été réunis par la tradition pour offrir une catéchèse sur l’attitude qu’on doit avoir vis-à-vis la richesse.

Le Christ répète continuellement que la richesse peut devenir un obstacle sur le chemin de vie chrétienne. «Le terrible pouvoir» de l’argent – nous le voyons aujourd’hui avec la Commission Charbonneau - est dénoncé par Jésus dans tout au long de sa prédication. Luc nous dit au chapitre 16, 13 : «Vous ne pouvez pas servir Dieu et Mammon» (Mammon est le nom araméen pour désigner le dieu argent). Dans la parabole du riche fermier, celui-ci devient «insensé» et s’imagine qu’avec son argent il peut se passer de Dieu (Luc 12, 16-20). Dans la parabole de la semence, le Christ nous dit que souvent la richesse étouffe la parole de Dieu et l’empêche de porter du fruit (Matthieu 13, 22). L’homme riche qui festoie tous les jours alors que Lazare se meurt à sa porte (Luc 16, 19-31) est un exemple qui indique comment la richesse peut nous rendre aveugle aux besoins des autres. Nulle part il est dit que le riche avait acquis ses richesses de façon malhonnête. Il est condamné parce que ses possessions l’ont rendu aveugle aux souffrances du pauvre qui se mourrait à sa porte, pendant que lui se payait le grand luxe et festoyait tous les jours.

L’important est de se libérer, chacun à sa façon, pour suivre le Christ.

L’histoire du jeune homme riche, dans l’évangile d’aujourd’hui, se termine mal! «L’homme devint sombre et tout triste» : il a peur du couteau prêt à trancher dans ses sécurités. Il refuse «de partir vers une terre inconnue», comme l’avait fait Abraham autrefois, dans sa vieillesse. 

Pour bien comprendre ce texte, il faut nous reporter à la tradition méditerranéenne. Pour nous, la richesse signifie avoir plein d’argent. Pour les pays entourant la Méditerranée, la richesse comprend d’abord et avant tout la famille, la maison, la terre. La fin de l’évangile d’aujourd’hui indique ce genre de richesse qui dépasse l’argent accumulé dans le compte bancaire : «Personne n’aura quitté, à cause de moi et de l’évangile, une maison, des frères, des sœurs, mère, enfants et terre, sans qu’il reçoive le centuple». Le jeune homme riche est invité à partager l’argent qui le retient comme un boulet au pied, mais aussi à s’éloigner des valeurs de sa famille, valeurs qui l’empêchent d’être un disciple du Christ. Pour progresser dans la vie chrétienne, nous sommes invités à combattre les préjugés et certaines valeurs de notre famille. Nous devons aussi mettre de côté la suffisance religieuse qui s’apparente à celle des docteurs de la Loi, des pharisiens et des prêtres. Il est aussi pénible à de brillants théologiens, à de grands directeurs spirituels, riches de leur sagesse et de leur sainteté, qu’à un riche industriel ou un commerçant cossu, de se dépouiller pour marcher derrière Jésus.

Les détachements peuvent être différents, mais tous ils nous invitent à l’allègement pour suivre le Seigneur : Abraham a été appelé à quitter son pays, Pierre ses filets, Matthieu son bureau de douane, Élisée sa ferme, Nathanaël sa retraite. Pour chacun, les coûts sont élevés mais ils apportent une libération nécessaire. Jésus parle de ce genre de dépouillement dans la parabole de la perle et du trésor caché dans un champ. «Un homme ayant trouvé un trésor dans un champ s’en va ravi de joie vendre tout ce qu’il possède, et achète ce champ.» (Matthieu 13, 44-45) L’histoire du jeune homme riche nous rappelle qu’on ne peut se mettre à la suite du Seigneur en demeurant encombré de lourds bagages. «Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le royaume de Dieu».

Nous constatons qu’en nous invitant à le suivre, Jésus ne met pas l’accent sur ce qu’on doit abandonner mais sur le bonheur que l’on découvre à le faire : «Un homme ayant trouvé un trésor s’en va ravi de joie!». La renonciation aux richesses n’est pas un but en soi mais simplement une exigence préalable pour devenir un disciple du Christ. Chacun et chacune doit renoncer à ce qui l’empêche de répondre à cette invitation : «Viens et suis moi».

Jésus appelle d’abord et avant tout au dépassement. Pour l’homme riche, se dépasser eût été de se détacher de ses trop grands biens. Pour d’autres, ce sera d’oublier ses titres et ses réussites en affaires ou en politique, de changer sa façon de traiter les autres, de corriger son manque de générosité, son égoïsme, sa paresse, etc. L’important est de se libérer, chacun à sa façon, pour suivre le Christ. «Jésus fixa sur lui son regard et l’aima

Source: https://www.cursillos.ca/formation/reflexions-dominicales/annee-B/R-B56-Dim28.htm

Réflexion sur l'évangile du 28e dimanche ordinaire, B

Par le Père Yvon-Michel Allard, s.v.d., directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada.