Dans le texte d’aujourd’hui, Matthieu nous présente deux paraboles de Jésus, l’une à la suite de l’autre : celle du banquet de noces et celle du vêtement de fête. Chacune d’elles éclaire un aspect important du Royaume de Dieu.
Pour ce qui est de la colère du roi, à la fin de la première parabole (les troupes qui font périr et brûlent la ville), il est clair que Matthieu avait en tête les événements tragiques qui s’étaient passés peu de temps avant la rédaction de son évangile : la révolte juive contre l’empire romain et la destruction du temple et de la ville de Jérusalem par les troupes de Titus en 70. Des milliers de Juifs furent massacrés et ce fut la fin de l’État d’Israël qui ne renaîtra que 19 siècles plus tard, en 1948.
La première parabole nous rappelle que la rencontre avec Dieu est une grande fête. Le banquet est signe d’amitié et la porte est ouverte à tous : «ils rassembleront tous ceux qu’ils rencontreront, les mauvais et les bons». Personne ne peut dire: «Moi je ne suis pas digne, je ne suis pas invité». La séparation entre les bons et les mauvais est disparue. Toutes les barrières tombent : «Allez aux croisées des chemins et invitez tous ceux que vous rencontrerez». Comme le dit si bien S. Paul : «dans la maison du Père, il n’y a ni Grec ni de Juif, ni circoncis ni incirconcis, ni homme ni femme, ni barbare ni Scythe, ni esclave ni homme libre»... Blancs et noirs, chrétiens et musulmans, jeunes et vieux, hommes et femmes, riches et pauvres... tous sont invités.
Dans l’antiquité, un repas de fête était très exclusif. Seuls les membres de la famille ou du clan étaient invités. Le fait que les premiers chrétiens accueillaient tout le monde à l’eucharistie et à l’agapè, que l’esclave était assis à la même table que le propriétaire foncier, que les pauvres et les riches, les hommes et les femmes partageaient le même repas, soulevait de sérieux problèmes que l’on retrouve dans les Actes des apôtres et dans les lettres de Saint Paul.
La parabole est claire : le roi invite tout le monde. Le Royaume de Dieu n’est pas une société de gens parfaits, mais de pécheurs pardonnés. La discrimination et l’apartheid n’existent plus.
Dans le rituel de l’eucharistie, il y a une très belle formule qui nous est répétée avant chaque communion : «Heureux sommes nous d’être les invités au repas du Seigneur...» Grand nombre de chrétiens ignorent cette invitation, par indifférence, ou parce qu’ils sont trop occupés. D’autres contestent l’offre avec agressivité. Ils sont contre ceux qui vont à l’église, contre le clergé, contre la religion en général. Jésus dépeint ici ces deux catégories de personnes.
Aujourd’hui encore, nous retrouvons ces mêmes groupes de personnes. Il suffit de donner quelques exemples sous les mots de jadis : «comment voulez-vous que j’aille à la messe? Je n’ai que mon dimanche pour jouer au golf ou au tennis. C’est le jour où nous partons en voyage. C’est ma journée de bricolage. Et puis, j’ai mes devoirs à faire et mes examens à préparer ...» Ensuite, il y a ceux et celles qui attaquent les religions comme des «organismes de grande noirceur» et qui ne croient qu’à leur propre religion laïque.
La deuxième parabole, celle du vêtement de noces, est bien différente de la première. Dieu continue à inviter mais il demande notre participation : il veut des partenaires actifs qui participent à la construction du Royaume de Dieu.
Le vêtement de fête fait parti de toutes les civilisations. Partout dans la Bible nous retrouvons des traces de ce vêtement bien spécial. Dans l’histoire de l’enfant prodigue, par exemple, le père donne de nouveaux vêtements à son fils qui rentre au foyer. Dans l’Église des premiers siècles, les nouveaux baptisés revêtaient un vêtement blanc pendant une semaine entière, symbole d’une vie nouvelle. Cette longue tradition de vêtements de fête est transmise par les jeunes mariés, par l’enfant présenté aux fonts baptismaux, par les étudiants qui célèbrent l’obtention de leurs diplômes, etc.
Comme vêtements de fête, saint Paul nous fait une belle suggestion : «Comme des élus de Dieu, mes bien-aimés, revêtez le vêtement d’amour et de compassion, de bonté, d’humilité, de douceur et de patience. Supportez-vous les uns les autres. Pardonnez-vous l’un à l’autre comme le Christ vous a pardonné. A votre tour, placez par-dessus tout la charité, ce lien parfait.» (Colossiens 3, 12-15) Ou encore, dans sa lettre aux Éphésiens : «Dépouillez-vous du vieil homme... et revêtez l’homme nouveau, créé selon Dieu, dans la justice et la sainteté de la vérité» (Éphésiens 4, 22-24).
Cette deuxième parabole nous rappelle que le salut n’est jamais automatique: il faut répondre à l’invitation de Dieu en nous transformant, en nous convertissant.
L’invité au banquet, qui n’avait pas de vêtement de fête, ne pouvait donc participer car il lui manquait une disposition fondamentale : l’âme festive et l’esprit de service. La parabole du retour de l’enfant prodigue nous aide à comprendre cette référence au vêtement de noces. Le fils aîné qui revient des champs et entend la musique de la fête est furieux contre son frère et contre son père. Il refuse d’entrer et le père sort pour l’inviter à la fête. Ce fils n’est pas prêt à participer à la célébration, il n’a pas encore revêtu le vêtement de fête !
Source: https://www.cursillos.ca/formation/reflexions-dominicales/annee-A/R-A56-Dim28.htm
Par le Père Yvon-Michel Allard, s.v.d., directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada