Dans le texte d’aujourd’hui, l’expression «porter du fruit» est répétée six fois en quelques lignes. Ce sont les fruits et non les belles paroles qui nous identifient en tant que disciples du Christ : «ce ne sont pas ceux et celles qui disent <Seigneur, Seigneur> qui entreront dans le royaume des cieux, mais ceux et celles qui font la volonté de mon Père» (Mt 7, 21). Jésus condamne le figuier stérile qui n’avait que des feuilles. Il réprouve le servant inutile qui enterre son talent. Il reproche aux pharisiens de ne pas faire les œuvres de leur père Abraham (Jn 8, 39, Mt 3, 9). «C’est à leurs fruits que vous les reconnaîtrez» (Mt 7, 16).
L’abbé Pierre répétait souvent : «Lorsque nous arriverons à la fin de notre vie, on ne nous demandera pas si nous avons été croyants, mais si nous avons été crédibles», si nous avons vécu nos engagements chrétiens de façon cohérente.
Notre foi peut se développer si elle est vivante, si elle joue un rôle actif dans notre vie de tous les jours, si elle porte du fruit. C’est pourquoi nous venons rencontrer le Seigneur chaque dimanche afin d’écouter sa parole et reprendre des forces pour la semaine qui commence. Porter du fruit ne veut pas dire faire des choses extraordinaires, ça veut dire bien faire les choses ordinaires. Rattachés au Christ comme les sarments à la vigne, éclairés par l’Esprit Saint, nous pouvons alors donner du fruit en abondance. Les fruits de l’Esprit, nous dit Saint Paul sont : «l’amour, la joie, la paix, la patience, la bonté, la douceur, la fidélité, la tendresse, la capacité de contrôler nos colères»...
Porter du fruit, c’est donner un coup de main au voisin malade ou handicapé, visiter les vieux parents qui vivent dans la solitude, venir en aide à ceux et celles qui souffrent, savoir écouter et encourager, pardonner à ceux et celles qui nous ont offensés, faire un peu de bénévolat, participer à la vie de la paroisse, partager avec ceux et celles qui sont dans le besoin, etc.
Lorsque j’étais dans l’enseignement, j’ai connu des étudiants qui, en équipe de deux (une fille et un garçon), chaque samedi matin, allaient visiter des personnes âgées. Ils faisaient un peu de ménage, allaient faire les courses avec le ou les personnes qu’ils visitaient, préparaient le dîner. Mais ce qui était le plus important pour les personnes âgées, c’était la rencontre avec ces jeunes étudiants. Plus tard, dans la paroisse où je travaillais au Mexique, des médecins, des infirmières, des bénévoles, de concert avec le conseil de la paroisse, ont ouvert une clinique médicale dans le sous-sol de l’église. Ils donnaient quelques heures de leur temps pour recevoir et soigner les pauvres qui n’avaient pas le moyen de visiter l’hôpital ou le cabinet du médecin. On distribuait des médicaments gratuitement, selon les besoins. Pour plusieurs de ces malades, c’était la première fois qu’ils rencontraient un médecin ou une infirmière.
Ici au Québec, des milliers d’aidants et d’aidantes s’occupent de grands handicapés, des dizaines de bénévoles apportent la popote roulante, des membres de la chorale chantent à la paroisse et dans les résidences de personnes âgées, des bénévoles généreux consacrent plusieurs heures chaque semaine à visiter les malades des hôpitaux et à leur rendre les services dont ils ont besoin. Tous ces gens portent du fruit en faveur de ceux et de celles dans le besoin.
Le texte d’aujourd’hui nous rappelle qu’il faut entretenir une relation régulière avec le Christ, afin que notre foi et notre engagement ne s’éteignent pas, comme la flamme d’une lampe qui manque d’huile. Grâce à la sève vivifiante de la vigne, les oeuvres de bonté peuvent se produire et se multiplier.
Il est intéressant de noter que, dans son évangile, Jean ait remplacé l’institution de l’Eucharistie par le lavement des pieds : «Vous m’appelez Maître et Seigneur, et vous dites bien, car je le suis. Dès lors, si je vous ai lavé les pieds, moi, le Seigneur et le Maître, vous devez vous aussi vous laver les pieds les uns aux autres ; car c’est un exemple que je vous ai donné : ce que j’ai fait pour vous, faites-le vous aussi.» (Jn 13, 13-15). Les communautés chrétiennes du premier siècle célébraient l’eucharistie tous les dimanches, donc l’évangéliste ne sentait pas le besoin d’en décrire l’institution lors de la dernière scène. Par contre, il voulait mettre l’accent sur les œuvres et les fruits que l’eucharistie et la rencontre avec le Christ pouvait engendrer.
Dieu a besoin de nous pour créer un monde meilleur, un monde de respect, de fraternité et d’amour. Il a besoin de nos mains, de nos pieds, de notre coeur dans un univers souvent sans merci pour les plus faibles. Les textes d’aujourd’hui rappellent que si nous sommes unis au Christ, comme les sarments à la vigne, nous recevrons sa force et sa vie, nous nous aimerons les uns les autres et nous porterons beaucoup de fruit. «Celui qui demeure en moi porte beaucoup de fruit».
Source: https://www.cursillos.ca/formation/reflexions-dominicales/annee-B/R-B28-Paq5.htm
Par le Père Yvon-Michel Allard, s.v.d., directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada.