Saint Marc mentionne une douzaine de controverses mettant aux prises Jésus et les autorités religieuses de son temps. Aujourd’hui, il mentionne la controverse sur la tradition des anciens. Les scribes et les pharisiens posent à Jésus la question suivante : «Pourquoi tes disciples ne suivent-ils pas la tradition des anciens? Ils prennent leurs repas sans s’être lavé les mains.»
Jésus respecte la tradition, à condition qu’elle soit dynamique et vivifiante, qu’elle favorise une meilleure qualité de vie. La tradition doit nous libérer et nous aider à mieux vivre. Il ne s’agit pas simplement de répéter les gestes du passé, mais d’agir en conformité avec ce que nous croyons être important pour nous.
«Ghandi, qui était intrigué par le Sermon sur la Montagne et par Jésus-Christ lui-même, disait : «J’ai beaucoup d’estime et de respect pour le Christ, mais non pour les chrétiens... car ils disent et ne font pas.» Et il savait de quoi il parlait. Lorsqu’il avait voulu assister à une messe en Afrique du Sud, les chrétiens l’avaient empêché d’entrer, en lui disant que cette église était pour les blancs et qu’à deux coins de rue, il trouverait une église pour les noirs. Ghandi ne remit jamais les pieds dans une église. Cet épisode nous rappelle toutes ces années aux USA et en Afrique du Sud où les noirs ne pouvaient participer aux eucharisties des blancs.
Nos traditions sont souvent tintées de préjugés et de discriminations. Le Christ a lutté contre ce genre de traditions. Dans la parabole du bon Samaritain, il rappelle au prêtre et au lévite qu’ils auraient mieux fait de s’approcher de l’homme blessé et de lui venir en aide, plutôt que de s’en éloigner afin de suivre leur tradition et de ne pas enfreindre les lois du culte qui interdisaient de toucher un blessé ou un mort! «Sépulcres blanchis. Vous donnez l’apparence d’être justes, mais au-dedans, vous êtes pleins d’hypocrisie et d’iniquité. Vous observez les choses qui paressent, tout en négligeant les points les plus importants de la Loi, la justice, la miséricorde et la bonne foi.» (Matthieu 23, 23)
Le Seigneur est très dur envers les scribes et les pharisiens parce qu’ils pratiquent leur religion de façon superficielle, et ne répondent pas à l’essentiel de la Loi : «Guides aveugles… hypocrites…»
Jésus nous invite aujourd’hui à réfléchir sur nos pratiques religieuses et nos croyances. La source de notre action, affirme-t-il, se trouve au fond de notre coeur. Tout n’a pas la même importance dans la vie. Souvenez-vous de ce que Jésus disait au sujet de l’offrande à l’autel : «Si tu apportes ton offrande à l’autel et que là tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi, laisse-là ton offrande. Va d’abord te réconcilier avec ton frère, puis reviens présenter ton offrande.» (Matthieu 5, 23-24) La réconciliation est plus importante que toutes les offrandes à l’autel.
En mettant tout sur le même plan, nous détruisons notre échelle de valeurs. Il n’y a pas si longtemps, c’était un péché grave de boire un peu d’eau après minuit et de recevoir ensuite la communion! C’était un péché grave de manger de la viande le vendredi! Il y a des choses plus importantes que de boire un peu d’eau ou de manger de la viande certains jours de la semaine. Faire de ces actes «des péchés mortels» et mettre sur le même plan une gorgée d’eau avant la communion et le refus d’aider un blessé le long de la route (parabole du bon Samaritain), risque de dévaluer toute une série d’actions qui sont beaucoup plus importantes.
«Ce peuple m’honore des lèvres mais son cœur est loin de moi». La loi du Seigneur doit prendre sa source au fond de notre cœur. C’est de l’intérieur que viennent les bonnes et les mauvaises intentions.
À mesure que nous devenons plus matures dans notre foi, la parole de Dieu progresse en nous et devient source de lumière et de vie. Dans la deuxième lecture, S. Jacques nous invite à «recevoir avec docilité la Parole qui a été implantée en nous et qui peut nous sauver» (Jacques 1, 21). Nous avons ici la très belle image d’une petite graine qui est implantée et mise en terre dans notre coeur, d’une semence qui doit se développer et croître à maturité. Cette semence produira ses fruits, si elle est protégée et entretenue.
Aujourd’hui, Jésus nous indique la source du bien et du mal : le cœur humain. «C’est du dedans, du cœur de l’homme que sortent les pensées perverses». Il veut changer notre cœur de pierre en cœur de chair. Il nous invite à revoir continuellement notre échelle de valeurs afin de placer ce qui est le plus important en haut de notre agenda. «Ce peuple m’honore des lèvres, mais son coeur est loin de moi.»
Source : https://www.cursillos.ca/formation/reflexions-dominicales/annee-B/R-B49-Dim22.htm
Par le Père Yvon-Michel Allard, s.v.d., directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada.